De l'orthographe et sa nécessité

Publié le par Algor Vitae

L'orthographe, c'est comme la tenue vestimentaire. L'important, c'est qu'on l'entretienne de notre mieux, qu'elle soit propre et décente. Maintenant exiger, comme un adjudant de mes fesses, qu'il n'y ait jamais le moindre petit accroc, la moindre poussière ou la plus minuscule des peluches, c'est d'une crasse sottise. D'une crasse sottise, dis-je, parce que ça revient à s'éprendre de la forme avant le fond, à devenir vaniteux, favoriser le superfétatoire et oublier l'essentiel. Parce que lorsque nous parlons, au-delà de la correction de notre écriture ou notre prononciation, ce qui compte c'est ce qu'on dit.

 

Certes, on écrit pour séduire, mais séduction n'est pas glamour. On m'excusera -ou pas, mais peu me chaut- d'employer ici un mot anglais. Mais c'est que je crois qu'il a un sens inconnu du français: le glamour, c'est certes un éclat, une brillance, un charme, mais avec une certaine idée de superficiel. Le glamour, c'est un verni certes fort reluisant, mais très mince et prêt à disparaitre si on gratte avec l'ongle.


Or donc, à force de trop vouloir assortir la beauté de l'image à la beauté de l'idée, on passe de la séduction au glamour. Peut-on refuser, juste pour un malheureux x oublié, la demande de l'homme qui vous écrirait: « Veus-tu joindre à la mienne ta main, joindre à ton cœur le mien, et sous le pont de nos bras voir couler demain? » À l'ère des "chte kiff, ma meuf", peut-être n'en est on plus là...


Alors quoi ? Quelle est ma conclusion ? Que chacun s'applique, que chacun fasse de son mieux, mais que nul n'érige l'orthographe en affaire d'état. Même l'école ne le devrait pas. Parce que l'école forme des esprits et non des mains, et c'est pourquoi à l'instar des magistrats, les profs de lettre devraient se tenir non pas à la règle, mais à l'esprit de la règle.


L'esprit de la règle, c'est que le message passe. On s'habille pour se sentir au chaud, se sentir un peu beau et se sentir soi. Si l'on commence à s'habiller pour reluire aux yeux de tous, et en faire un enjeu social, presque politique, alors on a perdu tout le sens de ce que se vêtir signifie.


J'entends d'ici les mieux cérébralement dotés de mes détracteurs soupirer: « Çà ! Tout ce poncif pour une thèse qui finalement tenait en une ligne: “L'hypercorrection est nuisible”. Fi! » Mais oui, Messieurs, vous dites vrai. Mais parler reste un plaisir pour moi. Aussi vous prierai-je de laisser à mon ventre la jouissance de l'écriture, l'extase de pérorer. 

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